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Par Pestoune le 8 Novembre 2016 à 21:01
Dans une saveur de faim dure
Le pain essaime des arômes d’ivresse
J’ai dans ma bouche le craquement doux
L’or des hauts fourneaux
Où des hommes en blanc font fleurir le blé
Dans la saveur des faims sauvages
Le pain est dur et doux
Blond dans la main lourde de l’envie
Noir sous les doigts meurtris de la misère
Mais pain
Toujours
Hier le pain
Hier la faim
Pain tempête des désirs affolés
Pain torrent des jeunesses ivres de lendemains
Pain aux saveurs jamais combles
Mais pain d’hier, oui
Gravé en rides aiguës
Tout contre mes lèvres
Dans la ronde du temps
Des céréales dansent
Paysages de craquelures poudrées
Effluves de printemps
Sel des étés
Chaque bouchée éperonne le souffle
Chaque bouchée nourrit de chaud les hivers
En souffrance
Nourrit de feu les nuits de faim
Pain fort des plaisirs infinis
Pain frêle des éternités fugaces
Pain qui délivre une bonté de paumes ouvertes
Jusqu’au dur de l’attente
La main plie
Geste brut
Sur la brisure du pain
Dans mon poing
Le premier plaisir
Sans mot
Sans voix
Un geste sans hâte vers toi
J’ouvre les doigts
Goûte la multiplicité du pain
Sa grâce dorée
Mords son baiser de vie.
Leïla Zhour – Dans l’envers du silence Ed L’Ours Blanc
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Par Pestoune le 27 Octobre 2016 à 21:31
Sur une fracture de banquise
L’ourse grandit dans la constellation des peines
Astre patience de longues dérives
Fissures, craquements
Elle passe sous l’eau sombre du ciel
Et des turbans d’aurores empoussiérées
Lui font un loup dans l’étrange carnaval des pôles
L’ourse décompte
En âge de mémoire
Elle sait la nuit sans âge
Qui se résorbe
Sous la trace embleuie de ses pas
Blanche pourtant
Elle se rêve ourse des chasses stellaires
Où chaque morsure inventerait une pure liberté
Elle se reflète jusqu’au plus lointain du regard
Cette part obscure et si étroite encore d’elle-même
Au long d’une fissure de givre
L’ourse poursuit une longue randonnée
Et les étoiles
Drapées d’un vent de lumière silencieuse
Rêvent aussi sa course lente
Elle va si bas
Si lourd
Et douce pourtant
Dans l’onde des séismes nocturnes
Jusqu’au chevet des grands glaciers de sel
L’ourse griffe le temps du sombre
A l’hypogée des songes anciens
Elle va comptant les cris et les silences
Ombre parmi le blanc multiple des rives polaires
Et lourde, oui
Lourde et douce de tous les siècles
Elle recèle
Décèle
Pour tous
Au plus clair des cathédrales de glaces
La carte pâle des cheminements sans fin
Le miroir effacé chaque matin
Mais présent à chaque fêlure
A chaque dispersion des voix et des vents
Cette fracture
Une vie sauvage sous le pas lent de l’ourse blanche
Leïla Zhour – Dans l’envers du silence
Ce très joli poème est dédié à mon meilleur ami Alain. Merci pour ta présence, ton aide, ton soutien. Merci pour cette amitié rare, de celle qui ne se produit qu'une fois dans une vie.
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Par Pestoune le 21 Octobre 2016 à 20:17
Sans le paysan, aurais-tu du pain ?
C'est avec le blé qu'on fait la farine;
L'homme et les enfants, tous mourraient de faim,
Si dans la vallée et sur la colline,
On ne labourait et soir et matin.
Sans le boulanger, qui ferait la miche ?
Sans le bûcheron, — roi de la forêt, —
Sans poutres, comment est-ce qu'on ferait
La maison du pauvre et celle du riche ?
... Même notre chien n'aurait pas sa niche I
Où dormirais-tu dis, sans le maçon ?
C'est si bon d'avoir sa chaude maison
Où l'on est à table, ensemble, en famille !
Qui cuirait la soupe, au feu qui pétille,
Sans le charbonnier qui fît le charbon ?
Sans le tisserand, qui ferait la toile ?
Et sans le tailleur, qui coudrait l'habit ?
Il ne fait pas chaud à la belle étoile !
Irions-nous tous nus, le jour et la nuit,
Et l'hiver surtout, quand le nez bleuit ?
Aime le soldat, qui doit te défendre !
Aime bien ta mère, avec son cœur tendre !
C'est pour la défendre aussi qu'il se bat.
Quand les ennemis viendront pour la prendre,
Que deviendrais-tu sans le bon soldat ?
Aimez les métiers, le mien et les vôtres !
On voit bien des sots, pas un sot métier;
Et toute la terre est comme un chantier
Où chaque métier sert à tous les autres,
Et tout travailleur sert le monde entier.
Jean AICARD
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Par Pestoune le 19 Octobre 2016 à 21:21
Toi qui m'as tout repris jusqu'au bonheur d'attendre,
Tu m'as laissé pourtant l'aliment d'un coeur tendre,
L'amour ! Et ma mémoire où se nourrit l'amour.
Je lui dois le passé ; c'est presque ton retour !
C'est là que tu m'entends, c'est là que je t'adore,
C'est là que sans fierté je me révèle encore.
Ma vie est dans ce rêve où tu ne fuis jamais ;
Il a ta voix, ta voix ! Tu sais si je l'aimais !
C'est là que je te plains ; car plus d'une blessure,
Plus d'une gloire éteinte a troublé, j'en suis sûre,
Ton coeur si généreux pour d'autres que pour moi :
Je t'ai senti gémir ; je pleurais avec toi !
Qui donc saura te plaindre au fond de ta retraite,
Quand le cri de ma mort ira frapper ton sein ?
Tu t'éveilleras seul dans la foule distraite,
Où des amis d'un jour s'entr'égare l'essaim ;
Tu n'y sentiras plus une âme palpitante
Au bruit de tes malheurs, de tes moindres revers.
Ta vie, après ma mort, sera moins éclatante ;
Une part de toi-même aura fui l'univers.
Il est doux d'être aimé ! Cette croyance intime
Donne à tout on ne sait quel air d'enchantement ;
L'infidèle est content des pleurs de sa victime ;
Et, fier, aux pieds d'une autre il en est plus charmant.
Mais je n'étouffe plus dans mon incertitude :
Nous mourrons désunis, n'est-ce pas ? Tu le veux !
Pour t'oublier, viens voir ! ... qu'ai-je dit ? Vaine étude,
Où la nature apprend à surmonter ses cris,
Pour déguiser mon coeur, que m'avez-vous appris ?
La vérité s'élance à mes lèvres sincères ;
Sincère, elle t'appelle, et tu ne l'entends pas !
Ah ! Sans t'avoir troublé qu'elle meure tout bas !
Je ne sais point m'armer de froideurs mensongères :
Je sais fuir ; en fuyant on cache sa douleur,
Et la fatigue endort jusqu'au malheur.
Oui, plus que toi l'absence est douce aux cœurs fidèles :
Du temps qui nous effeuille elle amortit les ailes ;
Son voile a protégé l'ingrat qu'on veut chérir :
On ose aimer encore, on ne veut plus mourir.
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Par Pestoune le 14 Octobre 2016 à 21:10
On voit tout le temps, en automne,
Quelque chose qui vous étonne,
C’est une branche, tout à coup,
Qui s’effeuille dans votre cou.C’est un petit arbre tout rouge,
Un, d’une autre couleur encor,
Et puis, partout, ces feuilles d’or
Qui tombent sans que rien ne bouge.Nous aimons bien cette saison,
Mais la nuit si tôt va descendre !
Retournons vite à la maison
Rôtir nos marrons dans la cendre.Lucie DELARUE-MARDRUS
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