•  Le chant de la marguerite

     

    Le soleil, immense œil unique,

    Ne voit pas autant de choses que moi ;

    Et la lune, fière, tout-argent,

    Pourrait aussi bien n’être qu’un nuage.

     

    Et le Printemps, oh, le Printemps !

    Je mène une vie de Roi !

    Couché dans l’herbe foisonnante

    J’observe les jeunes beautés.

     

    J’ose regarder ce que nul n’ose voir

    Et j’observe ce que nul n’observe

    Et quand la nuit approche

    Les moutons bêlent ma berceuse.

     

                                                        John Keats

     

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    Solo est un très long poème (près de 50 pages) que Xavier Grall composa peu avant sa mort. C’est à la fois une ode à la vie, une prière à Dieu. Un texte particulièrement profond qui ne peut que toucher vos coeurs.

     

    cygnessauvages

     

    Seigneur me voici c’est moi

    je viens de petite Bretagne

    mon havresac est lourd de rimes

    de chagrins et de larmes

    j’ai marché

    Jusqu’à votre grand pays

    ce fut ma foi un long voyage

    trouvère

    j’ai marché par les villes

    et les bourgades

    François Villon

    dormait dans une auberge

    à Montfaucon

    dans les Ardennes des corbeaux

    et des hêtres

    Rimbaud interpellait les écluses

    les canaux et les fleuves

    Verlaine pleurait comme une veuve

    dans un bistrot de Lorraine

    Seigneur me voici c’est moi

    de Bretagne suis

    ma maison est à Botzulan

    mes enfants mon épouse y résident

    mon chien mes deux cyprès

    y ont demeurance

    m’accorderez-vous leur recouvrance ?

    Seigneur mettez vos doigts

    dans mes poumons pourris

    j’ai froid je suis exténué

    O mon corps blanc tout ex-voté

    j’ai marché

    les grands chemins chantaient

    dans les chapelles

    les saints dansaient dans les prairies

    parmi les chênes erraient les calvaires

    O les pardons populaires

    O ma patrie

    j’ai marché

    j’ai marché sur les terres bleues

    et pèlerines

    j’ai croisé les albatros

    et les grives

    mais je ne saurais dire

    jusqu’aux cieux

    l’exaltation des oiseaux

    tant mes mots dérivent

    et tant je suis malheureux

     

    Seigneur me voici c’est moi

    je viens à vous malade et nu

    j’ai fermé tout livre

    et tout poème

    afin que ne surgisse

    de mon esprit

    que cela seulement

    qui est ma pensée

    Humble et sans apprêt

    ainsi que la source primitive

    avant l’abondance des pluies

    et le luxe des fleurs

     

    Seigneur me voici devant votre face

    chanteur des manoirs et des haies

    que vous apporterai-je

    dans mes mains lasses

    sinon les traces et les allées

    l’âtre féal et le bruit des marées

    les temps ont passé

    comme l’onde sous le saule

    et je ne sais plus l’âge

    ni l’usage du corps

    je ne sais plus que le dit

    et la complainte

    telle la poésie

    mon âme serait-elle patiente

    au bout des galantes années ?

     

    Seigneur me voici c’est moi

    de votre terre j’ai tout aimé

    les mers et les saisons

    et les hommes étranges

    meilleurs que leurs idées

    et comme la haine est difficile

    les amants marchent dans la ville

    souvenez-vous de la beauté humaine

    dans les siècles et les cités

    mais comme la peine est prochaine !

     

    Je viens d’un pays musicien

    liesses colères et remords

    amènent les vents hurleurs

    sur le clavier des ports

     

    Seigneur ayez pitié !

    je viens d’un pays chrétien

     ma Galilée des lacs et des ajoncs

     enchante les tourterelles

     dans les vallons d’avril

     me voici Seigneur devant votre face

     sainte et adorable

     mendiant un coin de paradis

     parmi les poètes de votre extrace

     si maigre si nu

     je prendrai si peu de place

     que cette grâce

     je vous supplie de l’accorder

     au pauvre hère que je suis

     ayez pitié Seigneur

     des bardes et des bohémiennes

     qui ont perdu leur vie

     sur le chemin des auberges

     nulle orgue grégorienne

     n’a salué leur trépas

     pour ceux qui meurent

     dans les fossés

     une feuille d’herbe dans la bouche

     le cœur troué d’une vielle peine

     de lourdes larmes dans le paletot

     et dans les veines des lais et des rimes

     Seigneur ayez pitié !

     

    Xavier Grall " Solo et autres poèmes " (1981) 

     

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    Photographies de Vincent Munier

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    Écoutez la chanson bien douce

    Qui ne pleure que pour vous plaire.

    Elle est discrète, elle est légère :

    Un frisson d'eau sur de la mousse !

     

    La voix vous fut connue (et chère?),

    Mais à présent elle est voilée

    Comme une veuve désolée,

    Pourtant comme elle encore fière,

     

    Et dans les longs plis de son voile

    Qui palpite aux brises d'automne,

    Cache et montre au coeur qui s'étonne

    La vérité comme une étoile.

     

    Elle dit, la voix reconnue,

    Que la bonté c'est notre vie,

    Que de la haine et de l'envie

    Rien ne reste, la mort venue.

     

    Elle parle aussi de la gloire

    D'être simple sans plus attendre,

    Et de noces d'or et du tendre

    Bonheur d'une paix sans victoire.

     

    Accueillez la voix qui persiste

    Dans son naïf épithalame.

    Allez, rien n'est meilleur à l'âme

    Que de faire une âme moins triste !

     

    Elle est en peine et de passage,

    L'âme qui souffre sans colère,

    Et comme sa morale est claire !...

    Écoutez la chanson bien sage.

     

                                                                       Paul Verlaine, Sagesse

     

    Ce poème déclamé par Paul Léautaud, un merveilleux document

    https://www.youtube.com/watch?v=44dmzKwe7Sk

     

    Interprété par Léo Ferré

    https://www.youtube.com/watch?v=PkzYDSfQk3c


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    Roses, jasmins, iris, lilas, volubilis,

    Cerisiers du Japon et jeunes arbousiers,

    Colorant le matin de leurs chants printaniers

    Adornent mon jardin de vivants ex libris.

     

    Abeilles et frelons s'y disputant les lys,

    Piétinent les pistils sans aucune pitié,

    Alors que, s'échappant des pages d'un herbier,

    Un papillon de nuit dévore un myosotis.

     

    Solitaire et pensif, un arôme somnole

    Sous le dais argenté d'un antique olivier,

    Dont l'ombre de satin imite l'Acropole.

     

    Dans mon jardin aussi, le soleil a planté

    Une pure fontaine, comme un encrier,

    Où je plonge ma plume et bois l'éternité.

     

    Francis Etienne Sicard.

     

    coquelicots

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    Homme ! Libre penseur - te crois-tu seul pensant

    Dans ce monde où la vie éclate en toute chose :

    Des forces que tu tiens ta liberté dispose,

    Mais de tous tes conseils l'univers est absent.

     

    Respecte dans la bête un esprit agissant : ...

    Chaque fleur est une âme à la Nature éclose ;

    Un mystère d'amour dans le métal repose :

    "Tout est sensible !

    - Et tout sur ton être est puissant !

     

    Crains dans le mur aveugle un regard qui t'épie

    A la matière même un verbe est attaché ...

    Ne la fais pas servir à quelque usage impie !

     

    Souvent dans l'être obscur habite un Dieu caché ;

    Et comme un oeil naissant couvert par ses paupières,

    Un pur esprit s'accroît sous l'écorce des pierres !

     

     

    Sans titre 1 (2)

     

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