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Par Pestoune le 27 Janvier 2015 à 22:13
Flocon
Venant de Norvège
Un flocon de neige
Qui volait au vent
S’en allait rêvant.
Voyant une fille
D’allure gentille
Par le Nord giflée
Bien emmitouflée
D’un bonnet de laine
Il se dit : "Ma veine !
De la bonne aubaine
Si je profitais pour me camoufler
Et me réchauffer.
J’attendrai demain
Pour continuer tout ce long chemin."
Il n’eut pas de peine
A mettre le nez
Dessous le bonnet
Mais sa longue route
Soudain s’arrêta :
Une frêle goutte
Fut le résultat.
Ceux qui se figurent
Pouvoir ignorer
Tout de leur nature
N’ont plus qu’à pleurer.de Louis Delorme
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Par Pestoune le 10 Janvier 2015 à 23:22
Madassa
Madassa ne savait ni lire ni écrire.
Madassa avait l’âge qu’ont les enfants
quand ils savent lire et écrire
mais Madassa ne savait ni lire ni écrire.
Dans la tête de Madassa
il n’y avait pas de place pour les mots.
Dans la tête de Madassa
il y avait une peur toute noire,
avec des bruits de guerre,
et des morts, beaucoup de morts.
Dans la tête de Madassa
il y avait une colère rouge,
avec des « Pourquoi ? Pourquoi ? »
comme des griffes qui faisaient mal.
Dans la tête de Madassa il y avait un brouillard
de tristesse si épais, qu’il n’arrivait plus
à se souvenir du visage de son frère et de sa sœur
qui avaient disparu personne ne savait où.
Certains jours, dans la tête de Madassa,
il y avait aussi la faim qui lui remontait du ventre.
Le noir de la peur, les griffes
de la colère, le brouillard de tristesse
– et certains jours la faim – prenaient
toute la place dans la tête de Madassa.
Il n’y avait plus de place pour les mots.
La maîtresse ne savait pas quoi faire
pour aider Madassa. Quand elle avait
du temps, elle lui lisait les histoires
qu’il ne pouvait lire tout seul.
L’histoire du Petit Poucet
qui avait si peur dans la forêt
– et la peur du Petit Poucet
se promenait dans la tête de Madassa.
L’histoire du Grand Crieur
qui était toujours en colère
– et la colère du Grand Crieur
était une colère dans la tête
de Madassa.
L’histoire de la Petite Marchande
d’allumettes – et la tristesse
de la Petite Marchande pleurait
dans la tête de Madassa.
La maîtresse racontait aussi
l’histoire de Pierrot-la-Lune
qui voulait fleurir toute la terre
avec des plumes d’oiseau
– et les plumes dansaient
dans la tête de Madassa.
Dans la tête de Madassa,
la peur du Petit Poucet laissait
des mots pour dire la peur.
La colère du Grand Trieur laissait
des mots pour dire la colère.
La tristesse de la Petite Marchande
laissait des mots pour dire la tristesse.
La danse des mots de Pierrot-la-Lune
laissait des mots qui donnaient
envie de danser.
Un matin, les mots qui s’agitaient si fort
dans la tête de Madassa ne voulurent pas
y rester. Madassa prit un cahier, un stylo,
et un peu maladroitement, comme un enfant
qui apprend à marcher, il écrivit :
Madassa peur
Madassa colère
Madassa tristesse
Madassa dans les herbes
Madassa dans le vent
Madassa dans l’eau
Madassa gris noir bleu
Madassa rouge jaune noir
Madassa gris jaune vert
Madassa coq tigre
Madassa soleil
— Un poème ! — dit la maîtresse. — Tu as écrit un poème !
C’était donc ça, écrire !
Prendre des mots dans des histoires
et en faire les mots de Madassa.
Il fallait lire beaucoup d’histoires
pour avoir beaucoup de mots.
Madassa se mit à lire.
Et à écrire, encore.
Plus il lisait, plus il écrivait.
Plus il écrivait, plus il avait envie de lire.
Ronde sans fin.
Madassa, qui ne savait ni lire ni écrire,
Remplissait maintenant des cahiers
Et des cahiers.
Un jour peut-être, à son tour,
Il en ferait un livre.
Madassa écrivain.
Michel Séonnet
Madassa
Paris, Ed. Sarcabane, 2003
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Par Pestoune le 10 Janvier 2015 à 13:34
Ecrit en une nuit, c'est l'hommage à Charlie Hebdo de Grand Corps Malade, à ceux qui sont tombés au champ de la liberté d'expression comme on dit au champ d'honneur.
https://www.youtube.com/watch?feature=player_embedded&v=U2a79-0QuGo
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Par Pestoune le 28 Décembre 2014 à 23:25
Voyage au Sénégal. (merci Alain pour la photo)
La vie, est-ce un voyage ?
Je ne sors pas souvent de chez moi
Aller en voyage ce n’est pas pour moi
Au mieux, je ne peux que les rêver
Si je voyage beaucoup c’est devant la télé
Je me contente de ce qu’a vécu un autre
Ou encore, de ce qu’il a filmé cet autre
Est-ce mon âge, ou bien ma conscience
J’aurais pu être un bon voyageur je pense
Bizarre, que ça me soit venu à l’esprit
Je pense avoir toujours rêvé ma vie
J’ai pourtant, des chaussures et deux pieds
Un jour, je me lèverai, et je partirai
Oui, il faudrait un jour que je m’amuse
Qu’il n’y ait pas que mes semelles que j’use
Quand je saurai vraiment, comment faire
J’irai un peu partout dans l’univers
Je sais, j’aime voyager, mais sans but précis
J’aime profiter de chaque endroit où je suis
Dans le passé, je l’ai fait devant la télé
J’ai pris le temps de visiter, de tout regarder
Puis je sais, que je me ferais des amis
Bien d’autres comme moi en auraient envie
On prendrait l’avion pour quelque part
Comme si c’était pour nous, un nouveau départ
Texte Claude Marcel Breault
Je me reconnais tellement dans ce texte Oui j'espère un jour chausser mes semelles de vent et partir admirer notre belle planète, visiter ses habitants. Un jour.... Peut-être.
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Par Pestoune le 14 Décembre 2014 à 23:39
La petite Espérance s'avance entre ses deux grandes sœurs
et on ne prend pas seulement garde à elle.
Sur le chemin du salut, sur le chemin charnel, sur le chemin
raboteux du salut, sur la route interminable, sur la route
entre ses deux sœurs la petite espérance
S'avance.
Entre ses deux grandes sœurs.
Le peuple chrétien ne voit que les deux grandes sœurs, n'a
de regard que pour les deux grandes sœurs.
Celle qui est à droite et celle qui est à gauche.
Et il ne voit quasiment pas celle qui est au milieu.
La petite, celle qui va encore à l'école.
Et qui marche.
Perdue dans les jupes de ses sœurs.
Et il croit volontiers que ce sont les deux grands
qui traînent la petite par la main.
Au milieu.
Entre les deux.
pour lui faire faire ce chemin raboteux du salut.
Les aveugles, ils ne voient pas au contraire
Que c'est elle au milieu qui entraîne ses grandes sœurs.
Et que sans elle elles ne seraient rien…
C'est elle, cette petite, qui entraîne tout.
Car la Foi ne voit que ce qui est. Et elle, elle voit ce qui sera.
La Charité n'aime que ce qui est. Et elle aime ce qui sera…
La Foi voit ce qui est. Dans le Temps et dans l'Éternité.
L'Espérance voit ce qui sera. Dans le temps et pour l'éternité…
Pour ainsi dire dans le futur de l'éternité même...
La Charité aime ce qui est. Dans le Temps et dans l'Éternité.
Dieu et le prochain.
Comme la Foi voit. Dieu et la création.
Mais l'Espérance aime ce qui sera. Dans le temps et pour l'éternité…
Pour ainsi dire dans le futur de l'éternité.
L'Espérance voit ce qui n'est pas encore et qui sera.
Elle aime ce qui n'est pas encore et qui sera…
Dans le futur du temps et de l'éternité.
(Charles PEGUY – Le proche du mystère de la deuxième vertu)
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