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Par Pestoune le 13 Mars 2018 à 00:17
Fi des banalités en bloc !
Vive l’amour ! Il te faut boire.
Bois le vin clair comme œil de coq,
d’une gazelle blanche et noire !
Le vin d’or a des reflets bleus.
Son allégresse est sans rivale.
Il saute comme une cigale
dans la chaleur des prés ombreux.
Et des comètes d’or le suivent,
passant de la nuit au grand jour.
Il n’est pas de palme ou de vigne :
mais c’est de l’hydromel tout court.
C’est du miel d’abeille aux ruches peuplées,
qui sont ses quartiers d’été comme hiver.
Elle butine les fleurs des vallées
et va s’abreuver l’eau d’étangs clairs.
Le nez camus, mince, agile, troussée,
Les yeux enfoncés, ignorant le mal,
tantôt l’abeille prend son vol nuptial.
Tantôt vierge, et tantôt de ses petits suitée.
Quand les gâteaux de miel se collent, dans la ruche,
les ouvrières viennent étancher leur soif.
L’heure est enfin venue, et le jour qui se cache,
de récolter le miel qui aux rayons se juche.
On le transvase, mélangé à l’eau du Nil,
dans un chaudron large et bas comme un puits,
lorsque les éclaireurs ont enlevé l’écume
et que le feu a purifié le miel fourni.
Ils le déposent dans les jarres goudronnées,
brunes, ternes, poudreuses, avec précaution.
L’hydromel va s’y reposer, sous le bouchon
d’argile, après avoir tempêté et grondé.
Abû Nuwâs
(Une anthologie des poésies arabes – Rachid Koraïchi )
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Par Pestoune le 26 Février 2018 à 22:35
Le bois de mon enfance a pour nom le Vert-Bois
Et pour moi les attraits des soupirs d’une femme
Les vents y sont si doux, les sapins en sont rois
Quand j’en franchis le seuil mon coeur ému s’enflamme.
Son silence est celui d’espaces enchanteurs
S’y mêlent les odeurs des mousses et des fougères
De résine et de lierre et le parfum des fleurs
Qui tapissent le sol des riantes clairières.
Les nymphes et les lutins peuplent la forêt sombre
Ils se livrent à leurs jeux imitant l’écureuil
De bonds en cabrioles ils sautillent dans l’ombre,
Le geai lisse ses plumes en sa livrée d’orgueil.
Les souches des sapins abritent les renards
Les fourmis ouvrières y tiennent aussi logis
La martre au brun pelage a surpris le regard
Du chasseur à l’affût qui menace sa vie.
Enfant j’allais couper le sapin de Noël
Les branchettes en ramée dont on fait les balais
Je récoltais les cônes avant le premier gel
Et le printemps venu des brassées de panais.
En été les framboises aux couleurs de rubis
Emplissaient mon panier pour faire les gelées
Réservées par grand’mère aux goûters entre amis
Au temps des blancs hivers, des neiges amoncelées.
Je revois en pensée notre garde-barrière
A l’orée d’un sous-bois là-bas elle officiait,
Du village voisin surveillant la frontière,
Les troupeaux égarés jour et nuit refoulait.
Laissez-moi célébrer du Vert-Bois la parure
Son nom évocateur souligne ainsi l’endroit
Où sous la voûte ombrée, le dôme de verdure
Souvent je musardais au couvert de son toit.
Toujours je chanterai le bois de mon enfance
Son écho est pour moi riche de souvenirs,
Le Vert-Bois me remplit des tendres résonances
D’un fabuleux passé qui m’enchante à ravir.
Henry Tournier (extrait de Glane de blés d’or)
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Par Pestoune le 24 Février 2018 à 22:17
Au creux de la forêt tout enserrée de nuit
J’ai arrêté mon pas à l’abord du mystère
A travers la branchure j’entrevois des morceaux
D’un vaste champ semé d’étoiles
Le feu tremblant qui les anime
Est attisé par l’ombre
L’ombre qui monte de la terre,
L’aube ne renaîtra qu’après que les étoiles
Auront bu patiemment cet océan de nuit ;
Tout est calme et silence profondeur majesté.
J’ai suspendu mon souffle pour écouter un bruit
Battement de mon coeur accroché à mon flanc.
Le battement devient chamade ;
La vie s’est dressée contre l’ombre.
« Pourquoi trembler poltron qu’aurais-tu donc à craindre ?
Laisse en toi réfugiée cette paix qui t’étreint
Et calme mon tourment ! »...
Le coeur a cessé son tumulte
L’âme s’est élevée au niveau d’harmonie
Où elle sait s’accorder avec les éléments
Venus d’autres espaces,
L’homme est peuplé de rêves le rêve peuple la terre…
La terre et l’homme ne sont plus
Ni l’espace ni le ciel constellé
Ni l’instant ni la forêt de nuit.
La création est retournée
Dans le sein de son Créateur,
Rien n’est plus.
L’âme désenchaînée radieuse et sublime
Vogue dans la lumière ondée de mélodie,
J’ai reconnu la Joie, la Joie miraculée,
La Joie qui emplissait l’Eden
Au temps perdu d’avant les temps.
Henry Tournier (extrait de Glane de blés d’or)
Poème ayant valu à Henry Tournier la Palme d’Argent de l’Académie de Poésie.
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Par Pestoune le 21 Février 2018 à 22:10
La belle Aurore en mignardise
Lève les rideaux de la nuit
Se dépouille de sa chemise
Et revêt sa robe qui luit.
C’est l’aube émue du jour nouveau
Salué par les ritournelles
De l’alouette et mille oiseaux
Qui se dispersent à tire d’aile.
Tandis que les feux des étoiles
Se noient dans l’océan céleste
L’astre du jour pourpre et sans voiles
A l’horizon se manifeste.
Ses tout premiers rayons s’attardent
Sur les rochers qu’ils incendient
Pourtant sur les rivières ils tardent
Les naïades y sont endormies.
La terre lentement s’éveille
Et chassant l’ombre de ses limbes
Le soleil exalte à merveilleux
Le monde enluminé de nimbes.
Henry Tournier (extrait de Glane de blés d’or)
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Par Pestoune le 15 Février 2018 à 22:13
Le houx a perdu sa parure
Du gui les perles ont piètre allure
La violette fleurit.
Doux m’est le chant du ruisselet
Qui se trémousse guilleret
Dans le creux de son lit.
Déjà s’annonce la feuillée
Dans la ramée tout emmouillée
D’ondée primesautière.
Le ciel gris se métamorphose
Il balance entre bleu et rose
Pour son avant-première.
Dans les nues le soleil paraît
Un rayon oblique un reflet
Sur l’étang qui frémit ;
Là, les grenouilles assemblées
Fraient en bordées enamourées
Et clapotent à l’envi.
A la corne du bois j’écoute
De joyeux accents sous la voûte
Prémisses du printemps.
Aux trilles des pinsons se mêlent
Les rires clairs des demoiselles
Au bras de leurs amants.
Henry Tournier (extrait de Glane de blés d’or)
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