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Par Pestoune le 20 Novembre 2021 à 21:00
Arbres remplis de fruits qu'en cette saison la nature
Nous donne généreusement !
Gaieté dans les vignes où les raisins bien mûrs
Sont cueillis en chantant.
Premiers brouillards et champignons cachés des bois
Nonnettes voilées, bolets bais...
Sous les noyers les enfants cherchent les dernières noix
Que le vent fait tomber.
Dans un grand champ un percheron retourne la terre
En fumant des nasaux
Pendant qu'une volée d'oiseaux se battent à l'arrière
Pour quelques vermisseaux !
De temps à autre, des aboiements cassent le silence
Mêlés de coups de feu ...
Cache-toi petite biche des chasseurs sans clémence,
Si tu veux vivre heureuse,
Dans les sous-bois colorés et les arbres chargés
D'or, de feu et d'argent.
Tes amis les cerfs se battent comme des enragés,
Pour toi, jeune et charmante !
Pourtant chaque soir le soleil rétrécit sa course
En voyageur pressé.
Et chaque nuit : la Petit' Ours se colle à la Grand' Ours
Sans jamais renoncer !
Premiers cheveux blancs qu'on voit dans un miroir
Dès l'automne de l'âge,
Derniers vols d'hirondelles qui sentent venir le froid
Et partent vers les plages...
C'est la rentrée, les marrons sont tombés ; les feuilles
Voltigent au vent du Nord
L'enfant tout joyeux saute, les poursuit et les cueille
En sortant de l'école,
Et des plus belles couleurs, il s'en remplit les mains,
Puis les porte à sa mère,
Qui pour ne pas décevoir, garde précieusement :
Ce trésor éphémère
Jean Claude Brinette
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Par Pestoune le 8 Novembre 2021 à 20:55
A ceux qui viendront après nous
Vraiment, je vis en de sombre temps !
Un langage sans malice est signe
De sottise, un front lisse
D’insensibilité. Celui qui rit
N’a pas encore reçu la terrible nouvelle.Que sont donc ces temps, où
Parler des arbres est presque un crime
Puisque c’est faire silence sur tant de forfaits !
Celui qui là-bas traverse tranquillement la rue
N’est-il donc plus accessible à ses amis
Qui sont dans la détresse ?C’est vrai : je gagne encore de quoi vivre.
Mais croyez-moi : c’est pur hasard. Manger à ma faim,
Rien de ce que je fais ne m’en donne le droit.
Par hasard je suis épargné. (Que ma chance me quitte et je suis perdu.)On me dit : mange, toi, et bois ! Sois heureux d’avoir ce que tu as !
Mais comment puis-je manger et boire, alors
Que j’enlève ce que je mange à l’affamé,
Que mon verre d’eau manque à celui qui meurt de soif ?
Et pourtant je mange et je bois.J’aimerais aussi être un sage.
Dans les livres anciens il est dit ce qu’est la sagesse :
Se tenir à l’écart des querelles du monde
Et sans crainte passer son peu de temps sur terre.
Aller son chemin sans violence
Rendre le bien pour le mal
Ne pas satisfaire ses désirs mais les oublier
Est aussi tenu pour sage.
Tout cela m’est impossible :
Vraiment, je vis en de sombre temps !II
Je vins dans les villes au temps du désordre
Quand la famine y régnait.
Je vins parmi les hommes au temps de l’émeute
Et je m’insurgeai avec eux.
Ainsi se passa le temps
Qui me fut donné sur terre.Mon pain, je le mangeais entre les batailles,
Pour dormir je m’étendais parmi les assassins.
L’amour, je m’y adonnais sans plus d’égards
Et devant la nature j’étais sans indulgence.
Ainsi se passa le temps
Qui me fut donné sur terre.De mon temps, les rues menaient au marécage.
Le langage me dénonçait au bourreau.
Je n’avais que peu de pouvoir. Mais celui des maîtres
Etait sans moi plus assuré, du moins je l’espérais.
Ainsi se passa le temps
Qui me fut donné sur terre.Les forces étaient limitées. Le but
Restait dans le lointain.
Nettement visible, bien que pour moi
Presque hors d’atteinte.
Ainsi se passa le temps
Qui me fut donné sur terre.III
Vous, qui émergerez du flot
Où nous avons sombré
Pensez
Quand vous parlez de nos faiblesses
Au sombre temps aussi
Dont vous êtes saufs.Nous allions, changeant de pays plus souvent que de souliers,
A travers les guerres de classes, désespérés
Là où il n’y avait qu’injustice et pas de révolte.Nous le savons :
La haine contre la bassesse, elle aussi
Tord les traits.
La colère contre l’injustice
Rend rauque la voix. Hélas, nous
Qui voulions préparer le terrain à l’amitié
Nous ne pouvions être nous-mêmes amicaux.Mais vous, quand le temps sera venu
Où l’homme aide l’homme,
Pensez à nous
Avec indulgence.Bertolt Brecht
"À ceux qui viendront après nous" de Bertol Brecht extraitlu par Augustin Trapenard
https://www.youtube.com/watch?v=eiTnsr4Nibc
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Par Pestoune le 25 Octobre 2021 à 20:55
Tu refuses que décline
l'espérance et que
s'enlise dans l'oubli
la prière des amants,
tu revois tant de géraniums
sur le rebord des fenêtres,
tant de reflets, après la
pluie, sur les jardins, tu
entends encore les chansons
que fredonnaient les filles,
le soir, avant de rentrer,
chez elles. Tu te consoles
avec ces ombres - mais cet
amour, ô cet amour qui éclaira
si fort ta jeunesse, ton corps
l'implore, aujourd'hui.
Richard Rognet -
Un peu d'ombre sera la réponse (extrait)
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Par Pestoune le 26 Septembre 2021 à 20:55
L'été ne fut pas adorable
Après cet hiver infernal,
Et quel printemps défavorable !
Et l'automne commence mal,
Bah ! nous nous réchauffâmes
En mêlant nos deux âmes.La pauvreté, notre compagne
Dont nous nous serions bien passés,
Vainement menait la campagne
Durant tous ces longs mois glacés ...
Nous incaguions l'intruse,
Son astuce et sa ruse.Et riches, de baisers sans nombre,
- La seule opulence, crois-moi, -
Que nous fait que le temps soit sombre
S'il fait soleil en moi, chez toi,
Et que le plaisir rie
À notre gueuserie ?Paul Verlaine
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Par Pestoune le 18 Août 2021 à 20:55
Il y a cette part en moi
Qui n’est pas à moi
Il y a cette faille en moi
Que je ne puis combler
Il y a cette ombre immense
Que je ne puis franchir
Il y a cette page maudite
Que je ne puis tourner
Plusieurs aveux s’affrontent
Dans mon dernier aveu
Plusieurs visages se heurtent
Dans mon dernier visage
Plusieurs regards se cherchent
Dans mon dernier regard
Nous sommes en très grand nombre
A occuper ma place
A dévorer les restes
De mon dernier repos
Paul Valet
extrait de "La parole qui me porte et autres poèmes"
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