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Poème sans titre et sans propriété de Yves-Jacques BOUIN
Il y a les rafales du temps que le vent épouvante. Les feuilles mortes tiennent un concert de castagnettes. Les arbres dansent en squelette. Tu glisses les ciels dans leur carton, tu alignes les routes dans l'étuis, et dans une boîte tu jettes les bruits.
Sur le seuil déjà, la valise avale le présent, la chaise est là, la table ronde, la lampe lape les dernières ombres, l'absence allonge ses membres dans le fauteuil, le miroir vide la pièce, la fenêtre regarde à l'intérieur. - Quoi bouge ? Tu éteins la lumière dans l'escalier -t u laisses de côté tout ce que tu ne connais pas - tu tires la porte derrière toi - tu quittes tout ce que tu n'as pas vécu, comme une conversation arrêtée au milieu. Que des gestes de crépuscule ! Des visages demeurent froissés dans la corbeille de l'oubli en attendant qu'un sourire les déplie. Tu regardes obstinément devant toi. Aucune vie ne t'appelle plus qu'une autre, sinon la vie.
Pars.
Où circulent-elles, les paroles que tu n'as pas atteintes, qui ne t'ont pas touché ? - Est-ce toi, lecteur, qui les prononces ? comme le poème du poème, dont nous regrettons peut-être, chacun d'un côté des mots, qu'il ne soit pas écrit. -
Tu voudrais savoir qui attend déjà à l'autre bout de la voix. Il y a là un bonheur embusqué. Dans tes bagages, la louange le dispute à la nostalgie. Nostalgie inguérissable liée à nul lieu, mais que perpétue chaque départ. Louange toujours renaissante, parce que la vie fait feu.
L'écriture ravale la réalité, les mots en sont la crête émerveillée.
Au-revoir.
A quel titre rester ?
Au-revoir.
Rien ne t'appartient.
Au-revoir.
Il est temps : la pluie vient.
Yves-Jacques BOUIN
extrait de "Le poème qui n'en finit pas de commencer toujours"
Ed de la Renarde Rouge
Tags : poeme, vie, jacques, yves
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Commentaires
J'aime son écriture libre qui se laisse glisser sans retenue mais toujours dans la poésie des mots, ceux qui nous retiennent et nous émeuvent car ils nous renvoient aussi à notre vécu !
C'est une belle découverte; merci Brigitte pour tes mots déposés, un beau sourire du matin .
Ce poème de Yves-Jacques BOUIN est magnifiquement écrit et capture parfaitement le sentiment de départ, d'adieu et d'incertitude qui accompagne souvent nos vies. Les images poétiques comme "Les arbres dansent en squelette" et "L'écriture ravale la réalité, les mots en sont la crête émerveillée" sont particulièrement frappantes. Ce poème nous rappelle la fugacité de la vie et l'importance de saisir chaque moment. Merci de l'avoir partagé.
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Jeudi 23 Novembre 2023 à 17:22
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De bien jolis mots... et une jolie photo "enneigée".....
Très bon dimanche et gros bisous