• Pourquoi ai-je accepté de célébrer des funérailles chrétiennes ?

    Pourquoi ai-je accepté de célébrer des funérailles chrétiennes ?

     

    Le manque de prêtres, la responsabilité leur incombant allant croissant, il fallait trouver une solution pour accompagner les familles lors de la perte d’un des leurs. Sachant que les funérailles ne sont pas un sacrement contrairement au baptême, à l'eucharistie, la confirmation, la réconciliation, le mariage, l'ordre et l'onction des malades, rien n’empêchait de confier cette mission d’église à des laïcs.  Il ne s’agit pas d’obsèques à deux vitesses comme on serait tenté de le penser. Toutes ces personnes appelées par le prêtre, puis formées à cette mission, suivent le même rituel que les prêtres. Elles sont titulaires d’une lettre de mission délivrée par leur évêque. La décision est difficile à prendre. Bien des questions se posent : sommes-nous capables de gérer l’émotion ? Saurons-nous trouver les mots de réconfort, les attitudes adéquates ? Saurons-nous affronter une assemblée ? Et les questions pratiques se rajoutent : comment faire une homélie (un commentaire de la Parole) ? Faire les rites dignement ?  Autant d’interrogations qui trouvent leurs réponses au cours de la formation et dans les rencontres avec les prêtres et les équipes.

     

    Il faut aussi avouer que les laïcs célébrants sont soumis à un stress supplémentaire. En effet, on leur pardonnera moins facilement un ratage qu’à un prêtre qui lui, aux yeux des gens, est investi d’une mission "divine".

     

    Pourquoi ai-je accepté de célébrer des funérailles chrétiennes ?

     

    Comment se préparent des obsèques ?

    Notre responsabilité, nous permet, au nom de l’Eglise d’accueillir les familles en deuil, et de prendre le temps nécessaire à leur écoute. Toutefois le prêtre peut parfois rencontrer les familles au moment de la messe dominicale qui suit les obsèques  si celles-ci se présentent à lui. Nous rencontrons les familles dans un premier temps afin de préparer la célébration avec elles selon le rituel mais aussi selon leur sensibilité, la situation. Nous leur expliquons la démarche de l'Eglise, la nôtre. Nous tentons de les réconforter, de les rassurer quant à la prise en charge de la célébration.

     

     

    Dans notre secteur nous officions à deux : la personne titulaire de la lettre de mission, dirigeant la célébration et une personne qui l’accompagne dont le rôle est primordial. En effet outre le soutien d’avoir à ses côtés quelqu’un d’autre, les accompagnants se chargent de la mise en place de l’église, des mots de mémoire, des prières universelles, de l’encens, souvent de l’accompagnement au cimetière.

     

    Nous commençons par être à l’écoute des familles. La préparation du mot de mémoire (retracer brièvement la vie de la personne défunte pour affirmer à la communauté que ça n’est pas n’importe qui que nous accompagnons, ça n’est pas un lambda mais un homme - une femme qui a aimé, souffert, vécu parmi nous… une personne qui a été importante pour la famille, les amis, les voisins, l’assemblée qui l’accompagnent), la préparation de ce mot donne lieu à des échanges intenses. C’est là que les familles se racontent, se confient, se soulagent. Une partie de cette conversation restera toujours privée et secrète. Nous respectons toujours le choix des familles, ses souhaits de ce qui peut être dit ou non. Mais ce moment est crucial. Il permet une relation de confiance entre les célébrants et les proches. Ces gens dans la peine se dévoilent, tombent le masque de la vie courante et nous avons devant nous des personnes éprouvés retrouvant leur humanité, leur tendresse, leur peine et les partageant. J’ai eu des rencontres formidables, des émotions intenses, des liens qui se sont créés.  Ne croyez pas que ces rencontres ne sont que larmes et tristesses. Non loin de là ! Combien de bons souvenirs remontent et amènent le sourire, le rire au milieu de la peine. Beaucoup de familles témoignent après du bien que leur apporte cet instant de partage, car nous partageons les expériences communes. Souvent on me dit se sentir plus à l’aise avec le laïc qu’avec le prêtre car, pour eux, le laïc partage la même vie, les mêmes expériences familiales.

     

    Ensuite viennent les choix des textes, les explications des rites, la possibilité d’offrir une ou des interventions de la famille ou pas selon leur désir (d’une lecture à un simple dépôt de bougie dans le silence… voire rien si les proches ne s’en sentent pas la force).

    Pourquoi ai-je accepté de célébrer des funérailles chrétiennes ?

     

    La préparation :

    Une fois rentrés, il nous faut préparer la célébration en elle-même. C’est du temps à consacrer, de la réflexion.  D’abord le commentaire de la Parole. Les familles auront choisi, si elle le souhaite sinon nous faisons ce choix nous-mêmes, une 1ère lecture, un psaume et un Evangile. A partir de ces trois textes en lien avec le défunt, sa vie, sa personnalité, ses rapports avec les autres, il faut réfléchir et mettre en texte un commentaire. C’est la partie la plus longue. Des ouvrages nous aident dans cette démarche pour celles et ceux qui ne se sentent pas la capacité de la faire seul. Ensuite viennent le choix des prières, monitions. En effet le rituel propose plusieurs prières qui s’adaptent aux différentes situations rencontrées. Et pour finir, il nous faut faire le choix de la partie musicale. La vie change, les gens n’ont plus le temps donc les chorales que nous avons connues, ont disparu dans beaucoup de lieux. D’où le choix de chants liturgiques, de musique classique sur des CD ou clé USB apportant de la paix et une qualité à la célébration.

     

    Pourquoi ai-je accepté de célébrer des funérailles chrétiennes ?

     

    La célébration en elle-même.

     

    Nous ne faisons pas n’importe quoi. Nous devons suivre un rituel que nous respectons. C’est indispensable pour éviter des dérives et des dérapages. La qualité de la célébration et de l’échange avec la communauté en dépend. Mais le rituel nous accorde une certaine souplesse par la proposition de prières multiples qui nous permet d'être au plus juste de la vie de chaque défunt. Nous avons le temps, nous prenons le temps pour permettre aux familles de vivre ce dernier moment avec l’être aimé qui s’en va vers la vie éternelle promise par Dieu auquel nous croyons. Des mots d’espérance, des mots de tristesse, de tendresse. Une attitude calme et posée. Autant de facteurs essentiels pour apporter un peu de réconfort aux familles en deuil. Elles ont besoin de ce moment pour faire leur au-revoir ou plutôt leur à-Dieu à la personne aimée. Et oui c’est volontairement que je décompose le adieu ainsi, car c’est à Dieu que l’on confie nos défunts. Et c’est là que nous les retrouverons. Le silence y a sa place aussi. Temps, calme, silence, respect constituant la célébration contribue  à la paix.

     

    Pourquoi ai-je accepté de célébrer des funérailles chrétiennes ?

     

    Pourquoi parfois des prêtres et parfois non ?

    Cela est ressenti comme une injustice par quelques familles. Dans certains secteurs, le prêtre continue de célébrer en fonction de ses possibilités de temps. Dans d’autres il ne le fait plus pour éviter ce genre de sentiments d’injustice. Toutefois, le prêtre reste un homme qui a tissé des liens d’amitié. Il lui arrive d’accompagner un ami. Le prêtre reste un homme mais il reste un prêtre en toute circonstance. Donc en tant que tel, il revêt son aube et se tient face à l’assemblée pour accompagner son ami. Nul ne peut lui reprocher cela.

     

    Il arrive aussi que nous, laïcs, faisons appel à lui dans des circonstances particulièrement dramatiques où la charge émotionnelle est trop lourde.

     

    Pourquoi ai-je accepté de célébrer des funérailles chrétiennes ?

     

    Pourquoi ai-je fait ce choix ?

    En réalité, je n’ai pas réfléchi longtemps. Je me sentais prête, j’avais peur mais j’étais prête à me lancer. La seule chose qui m’inquiétait, était la façon dont ma famille allait prendre ma décision. Depuis près d’une douzaine d’années, j’accompagne les familles en deuil. Je l’ai dit plus haut, j’ai fait des rencontres fantastiques, j’ai fait la connaissance de personnes rares, j’ai eu des échanges gratifiants et surtout je me suis sentie utile à ma communauté. Le deuil, c’est le moment où l’on se sent le plus fragile, le plus démuni. Que l’on accompagne un parent très âgé, un conjoint, un enfant, il y a une souffrance inquantifiable, un besoin d’écoute, d’accompagnement, il y a aussi le doute. L’écoute, c’est le mot qui définit le mieux la mission qui est la mienne. Je m’imagine à la place de ces personnes, ce que j’attendrais comme présence, aide et je mets à disposition de toutes ces personnes, mon cœur et mon amitié. Il y a des moments plus difficiles que d’autres, des circonstances où le décès est inacceptable. Il faut aussi accepter la colère des familles. Elles ont le droit d’être en colère contre la maladie, contre l’accident, le criminel qui aura fauché l’être aimé, contre Dieu aussi. Elles ont le droit d’exprimer cette colère et nous avons le devoir de l’accepter. Il n’y a pas de réponse toute faite, parfois il n’y a même pas de réponse du tout. Nous restons une présence, une écoute. Nous apportons notre expérience, notre sensibilité, notre humanité, notre foi. Je n’ai aucune certitude, j’ai aussi des moments de doute, des questions sans réponses mais je me mets au service de toutes ces personnes avec, j’espère, assez d’humilité pour qu’elles se sentent comprises et aimées.

     

    Dans cette mission tout est intense. Je voudrais, d’une certaine façon, que mon accompagnement soit visage du Christ pour les familles. Qu’elles ne se sentent pas abandonnées mais accompagnées par Lui au travers de nos actions. Je crois que nous sommes éclairés, guidés pour faire au mieux ce que l’Eglise attend de nous. Et heureusement. Car dans cette mission, il y a un facteur primordial, essentiel, incontournable : notre foi.

     

    Pourquoi ai-je accepté de célébrer des funérailles chrétiennes ?


     

     

    Pour finir ce témoignage, j’ai envie de vous partager un texte exprimant une grande foi dans une profonde humilité.

     

    La fille d’un homme avait demandé au pasteur de sa localité de venir prier avec son père. Lors que le pasteur arriva, il trouva l’homme étendu dans son lit avec sa tête soulevée par 2 oreillers. Il y avait une chaise vide a côté de son lit. Le pasteur pensant que le vieil homme savait qu’il venait et attendait sa visite, dit :

     

    « J‘imagine que vous m’attendiez. »

     

    « Mais non, mais qui êtes-vous? » dit le père.

     

    Le pasteur lui dit son nom, puis il fit la remarque:

     

    « J’ai vu la chaise vide, alors j’en ai déduit que vous saviez que j’allais venir ! »

     

    «  Ah oui… la chaise, » dit l’homme dans le lit.  « Pourriez-vous fermer la porte s’il vous plaît? »

    Un peu confus, le pasteur ferma la porte.

     « Je n’avais jamais dit cela à personne, même pas à ma fille,  » dit l’homme. « Mais durant toute ma vie, je n’ai jamais su comment prier. À l’église j’avais l’habitude d’entendre la pasteur parler de la prière, mais cela me passait par-dessus la tête.  J’ai abandonné toute tentative de prière,  » continua le vieil homme, « jusqu’au jour où, il y a à peu près 4 ans, mon meilleur ami me dit: « Jean, la prière c’est simplement une question d’avoir une conversation avec Jésus. Voici ce que je te suggère: Assieds-toi sur une chaise, et mets une chaise vide en face de toi, et dans la foi, vois Jésus assis sur la chaise. Ce n’est pas étrange, parce qu’il a fait cette promesse en disant: « Je serai toujours avec vous. » Puis parle-lui de la même manière que tu le fais avec moi maintenant. »

    « Alors j’ai essayé, et j’ai tellement aimé ça, que maintenant je le fais  chaque jour. Je fais très attention par contre. Si ma fille me voyait parler à une chaise vide, soit elle ferait une dépression, soit elle m’enverrait dans une maison de fous. »

    Le pasteur fut profondément touché par l’histoire, et encouragea le vieil homme à continuer son voyage de cette façon. Alors il pria avec lui, lui donna le sacrement des malades et retourna à l’église.

     

    Deux soirs plus tard, la fille du vieil homme appela le pasteur pour lui dire que son papa était mort cet après-midi-là.

    « Est-il mort en paix? » demanda le Pasteur.

    « Oui, et lorsque j’ai quitté la maison vers 2 heures, il m’a appelé près de son lit, il m’a dit qu’il m’aimait, et m’a embrassé sur la joue. Lorsque je suis revenue du magasin, une heure plus tard, je l’ai trouvé mort. »  Et elle continua, « Mais il y avait quelque chose d’étrange à sa mort. Apparemment, juste avant de mourir, papa s’est penché et a posé sa tête sur la chaise près de son lit. Que pensez-vous de cela ? »

    Le pasteur essuya une larme, et dit: « J’aimerais tellement qu’on puisse tous partir de cette manière. »

     

    Auteur inconnu

     

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  • Commentaires

    1
    Samedi 27 Septembre 2014 à 12:05
    J'ai ressenti une grande émotion à la lecture de ce texte empreint dune formidable tendresse et sensibilité de ton engagement envers les autres dans la peine.
      • Pestoune Profil de Pestoune
        Samedi 27 Septembre 2014 à 12:34
        Merci Patroux, c'est gentil. J'aimerai que ce texte ouvre à certains la perspective de pouvoir s'engager dans cette voie.
    2
    Mardi 4 Juillet 2023 à 07:38

    Ah oui en 2014 je ne connaissais pas ton blog 

    Merci à toi pour cet article 

    Bises 

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