• Les larmes - perles

    Il y avait un homme.... mais peut-être était-ce une femme ou un enfant, qui traversait le désert. Oui, le désert, à pied.  Et il pleurait, il pleurait, sans cesse, régulièrement, parfois doucement et parfois fort mais sans jamais s'arrêter, il pleurait au rythme de ses pas dans le sable. 

    Un jour, dans le grand désert, il croise un oiseau qui lui demande : 

    "Que fais-tu seul dans le désert ? 

    - Je marche et je pleure..."

    Et une grosse larme tombe de son œil qu'il ramasse aussitôt. 

    -"Pourquoi es-tu si triste ?

    -Je ne suis pas triste.

    -Alors, pourquoi pleures-tu ?

    -Regarde. Mes larmes deviennent des perles, dit-il en saisissant la larme lisse et brillante, j'en ai des milliers dans les poches. Veux-tu les voir ?

    -Oui, oui !"

    L'homme plonge la main dans sa poche gonflée et en ressort une poignée scintillante.

    -Comme elles sont belles !

    -Choisis-en une si tu veux.

    -C' est pour cela que tu ne t'arrêtes jamais de pleurer, pour avoir de plus en plus de perles ?

    -Exactement. Allez, choisis !

    -Je veux bien : celle-ci ! Ce n'est pas la plus grosse mais c'est la plus brillante

    -Tu as bien choisi. Adieu !

    -Adieu !

     

    L'oiseau saisit dans son bec la perle devenue trésor et s'éloigne, léger, rapide, tandis que celui qui pleure reprend de plus belle ses gémissements et sa marche lente. Plus loin, l'oiseau se pose et contemple la larme précieuse. Il se dit qu'il aimerait en avoir d'autres, oh, pas énormément, juste quelques unes comme cadeaux, pour d'autres voyageurs ailés. Alors il rebrousse chemin vers celui qu'il a laissé, "l'homme qui pleure", et le voit de loin peiner, alourdi par ses deux énormes poches emplies de perles. Bientôt, il ne peut plus mettre un pied devant l'autre, il tombe à genoux, se traîne encore et pourtant, malgré tout, il continue à pleurer, à pleurer et à recueillir ces "larmes perles" qu'il met dans ses poches.

    -"Mais arrête de pleurer, ce sont tes larmes qui t'empêchent d'avancer !

    -Je ne peux pas m'arrêter, je ne peux pas."

    Et deux grosses larmes tombent qu'il ramasse.

    "Pourtant je suis épuisé mais j'ai trop pris l'habitude… Je ne peux pas m'arrêter, non…"

     

    Soudain, l'oiseau d'un coup de bec vif et acéré, fait une petite entaille dans la poche de l'homme qui pleure, puis dans l'autre poche "crac", une autre entaille. Il aide l'homme à se relever, à marcher à nouveau, debout . De son chant et de ses ailes, il l'encourage. Alors, des poches trouées, une perle tombe, puis une autre; deux filets de perles sur le sable brûlant dessinent un chemin. Au fur et à mesure qu'il avance, l'homme est de plus en plus léger. Au fur et à mesure que ses poches se vident, traçant une route lumineuse, la source de ses larmes s'apaise et se tarit. Et quand ses poches sont enfin vides, alors, ses yeux sont enfin secs, son cœur à nouveau au bonheur et son pied si léger, si léger qu'il s'envole avec l'oiseau. Parfois, dans le grand désert, on peut voir un chemin de perles qui ne mène nulle part et si on lève le regard, on peut voir, auprès d'un oiseau, planer un homme… mais peut-être est-ce une femme, ou un enfant, qui sait ?  

     

    Conte extrait du roman de Mélissa Da Costa 

    "Tout le bleu du ciel" 

     

     

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  • Commentaires

    1
    Jeudi 16 Mai à 21:44

    Merci pour cet extrait qui m'a tenu en halène jusqu'au bout 

    Le corps et le coeur léger  lui ont donné des ailes 

    Dans un autre contexte on pourrait dire que rien ne sert d'en avoir plein les poches pour être heureux 

    @ demain Brigitte

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    2
    Lundi 27 Mai à 06:28

    Quel magnifique conte et quelle belle leçon de vie ! il faudrait parfois avoir un oiseau près de soi pour "entailler les poches de tristesse" et permettre d'avancer dans la joie et la légèreté...

    Très bonne journée et gros bisous.

    3
    Lundi 27 Mai à 06:34

    Ce conte est vraiment superbe.

    Bon lundi Brigitte.

    Christian

    4
    Lundi 27 Mai à 17:27

    bonjour Brigitte,

     un bien joli conte quel splendide extrait que j'ai lue er relue merci Brigitte belle fin d'après-midi et gros bisou monette

     

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