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Le bel arc
Un jour, un homme s’était retrouvé en possession d’un arc exceptionnel. Fabriqué dans un vieux morceau de santal rouge, il était en bois plein et tout à la fois solide et flexible : son maniement était exceptionnel.
L’homme était tombé en pâmoison devant son arc. Mais dans le même temps, il estimait qu’il n’était pas assez beau, trop sobre. Il demanda donc au plus habile artisan du pays de l’agrémenter d’une scène de chasse.
L’artisan déploya tout son talent pour graver cette scène de chasse, et force fut de constater que le résultat était au rendez-vous : la scène ainsi gravée était d’une vraisemblance frappant. On distinguait des chevaux en plein course à la poursuite du gibier, des cavaliers tirant des flèches avec leur arc, le soleil et le paysage : rien n’y manquait. De magnifiques fioritures venaient compléter le tout, gravées sur toute la surface restante de l’arc.
L’homme était ravi du résultat : son arc était désormais parfait. Il s’en empara, positionna une flèche, tira avec énergie la corde à lui. Et, patatras, l’arc se brisa : l’excès de fioritures, en fragilisant son bois, avait eu raison de lui.
L’arc était certes devenu magnifique, mais ce qui faisait sa force avait été sacrifié sur l’autel de la beauté. Combien de fois nous-mêmes ne sacrifions-nous pas nos dispositions naturelles sur l’autel des apparences ? Voilà qui s’appelle perdre de vue l’essentiel pour s’attacher aux détails.
Yu Dan « le bonheur selon Tchouang-tseu »
Tags : conte, arc
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Commentaires
Encore un conte, plein de vérité !!! Merci
Le tchouang-tseu est une mine.