• La nuit de Tante Arie de Hervé THIRY-DUVAL

    La légende de la tante Arie... Bonne semaine... | Legende, Semaine, Contes  et légendes

     

     

    La coutume familiale voulait que chaque Noël, à la nuit tombante, les enfants installent religieusement sur le rebord de la fenêtre une bougie allumée et une poignée de foin, en l’honneur de Tante Arie et son âne volant. La belle-mère de Marc Laville y tenait impérativement.

    Depuis quinze ans, Marc assistait à ce rituel désuet avec le même accablement. Aller à l’encontre des volontés de Thérèse Raguin n’était pas dans le pouvoir de Marc. Autant tenter de convaincre Pinocchio que mentir n’allonge pas le nez ! Chez les Raguin, on ne badinait pas avec les traditions. Quinze Noël, donc, à subir à la fois la dinde au vin jaune, la bûche « maison » à la crème au beurre avec les petits lutins, les blagues calamiteuses de Bruno son beau-frère et… Tante Arie !

    Ce 24 décembre 2001 ne fit pas exception à la règle, la « Tante Machin et son bourricot » eurent droit à la bougie et au foin. Thérèse Raguin rayonnait. Marc Laville n’avait jamais compris pourquoi sa belle-mère ne fêtait pas, tant qu’à faire, ce bon gros père Noël comme tout le monde. Non, elle s’entêtait avec sa Tante Arie, à croire que c’était une fée de sa famille !

    Curieusement, les enfants semblaient prendre un vrai plaisir à écouter Thérèse leur raconter, pour la millième fois, les histoires de cette vieille Carabosse franc-comtoise à pattes d’oie. Marc devait bien le reconnaître : « On n’a pas toujours les enfants qu’on mérite ! » pensa-t-il un instant dans les tréfonds de sa mauvaise humeur.

    Le rituel, une fois encore, fut respecté à la lettre. Vers minuit, avant de se goinfrer de bûche crémeuse, cousins et cousines montèrent à l’étage pour dormir – ou plutôt faire semblant --, en attendant le passage de la fée de Noël. Pendant ce temps-là, après avoir méticuleusement débarrassé la table, Thérèse Raguin et ses deux filles installèrent les cadeaux multicolores à l’extérieur de la maison, juste devant la fenêtre illuminée. Il commençait à neiger à gros flocons et en regardant le ciel, Thérèse murmura : « Tante Arie déchire sa chemise, fil à fil », ce qui fit glousser ses filles. Marc hocha la tête, l’air accablé.

    Une fois tout parfaitement en place, il ne restait plus qu’à libérer les fauves. Thérèse Raguin ouvrit le tiroir du buffet pour en sortir l’objet sacré, la clochette ! Dun geste large, elle la fit résonner quelques longues secondes dans toute la maison. C’était le signal attendu, la marque de Tante Arie ! Cela provoqua aussitôt une explosion de joie à l’étage, et sept sauvages, de trois à quatorze ans, se ruèrent dans l’escalier, au risque de se briser le cou. Pour courir en chaussons dans la neige ramasser leur trésor, et bien vite l’étaler devant la cheminée.

    Depuis longtemps, il avait été décidé, d’un commun accord entre adultes, que Tante Arie n’apporterait des cadeaux que pour les enfants. Aussi, toute la famille eut l’air passablement déconcerté – voire scandalisé ! – Lorsque Nina s’écria joyeusement : « Papa, y a quelque chose pour toi ! » Un cadeau ? Un cadeau pour Marc ? Une mauvaise blague de Bruno sans doute…

    Marc Laville n’en revenait pas. Après avoir nerveusement déchiré le papier doré, il tenant dans sa main l’incroyable : l’Aston-Martin DB5 miniature de James Bond 007, version Corgi, et dans sa boîte d’origine ! Le cadeau qu’il avait si fort espéré au matin du 25 décembre 1971, mais qui s’était diaboliquement changé en dictionnaire Larousse, en couleurs, pour débutants. Un souvenir cuisant.

    Sous le coup de l’émotion, Marc prétexta une irrésistible envie de fumer pour sortir un instant dans le froid de la nuit. Il avait chaud, bien trop chaud, son visage tirait sur le rouge tomate. Des cris et des rires d’enfants résonnaient au loin. A travers les fenêtres, Marc Laville voyait clignoter les sapins multicolores des maisons voisines. Il ne peut s’empêcher d’effleurer un instant la bosse de sa poche où se trouvait son cadeau. Ses yeux brillaient.

    En aspirant la première bouffée de sa cigarette blonde, il vit les traces, comme des pieds palmés, à deux pas de la fenêtre…

    S’il n’avait pas eu vraiment peur, si sa lèvre ne s’était pas mise à trembler, s’il avait osé suivre les étranges traces dans la neige fraîche, Marc Laville aurait bien été obligé de constater qu’elles montaient vers le petit bois et disparaissaient juste devant un gros rocher aux allures de dolmen fourbu.

    Un rocher qu’on nommait à Vyan-le-Val, la « roche de Tante Arie ».

     

                      Hervé THIRY-DUVAL

                                            "Contes et légendes de Haute-Saône et de Belfort"

     

    Qui est donc Tante Arie ? 

    Tante Arie ou Airie une bonne fée protectrice de la région de Franche-Comté et du canton du Jura en Suisse.   On prétend qu'elle vit dans une grotte du Lomont dans le Jura et qu’elle écoute les rêves des enfants portés par le vent en collant l’oreille à la paroi de sa grotte puis c'est vêtue en paysanne, coiffée de son diairi (coiffe féminine spécifique du costume du Pays de Montbéliard), elle arpente la campagne avec son âne Marion chargé de cadeaux de Noël pour les enfants. Et parfois cachée sous des déguisements divers, elle demande souvent l’hospitalité pour connaître les gens et encourager les ménages vertueux, travailleurs, soigneux et charitable.

     

    Chanson traditionnelle sur Tante Arie 

    https://www.youtube.com/watch?v=UD13AmiEcQc

     

    Un diairi 

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  • Commentaires

    1
    Mardi 15 Décembre 2020 à 06:58

    Joli conte, belle chanson et superbe coiffe brodée !*

    Très bonne journée et gros bisous

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