• J'ai tant rêvé de toi de Robert Desnos

     

        J'ai tant rêvé de toi que tu perds ta réalité.

        Est-il encore temps d'atteindre ce corps vivant

        Et de baiser sur cette bouche la naissance

        De la voix qui m'est chère?

     

        J'ai tant rêvé de toi que mes bras habitués

        En étreignant ton ombre

        A se croiser sur ma poitrine ne se plieraient pas

        Au contour de ton corps, peut-être.

        Et que, devant l'apparence réelle de ce qui me hante

        Et me gouverne depuis des jours et des années,

        Je deviendrais une ombre sans doute.

        O balances sentimentales.

     

        J'ai tant rêvé de toi qu'il n'est plus temps

        Sans doute que je m'éveille.

        Je dors debout, le corps exposé

        A toutes les apparences de la vie

        Et de l'amour et toi, la seule

        qui compte aujourd'hui pour moi,

        Je pourrais moins toucher ton front

        Et tes lèvres que les premières lèvres

        et le premier front venu.

     

        J'ai tant rêvé de toi, tant marché, parlé,

        Couché avec ton fantôme

        Qu'il ne me reste plus peut-être,

        Et pourtant, qu’à être fantôme

        Parmi les fantômes et plus ombre

        Cent fois que l'ombre qui se promène

        Et se promènera allègrement

        Sur le cadran solaire de ta vie.

     

                                                                 Robert Desnos, "Corps et biens".

     

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  • Commentaires

    1
    renal
    Vendredi 4 Septembre 2015 à 20:45
    Un beau poème. J'aime bien ce monsieur. Merci
      • Pestoune Profil de Pestoune
        Samedi 5 Septembre 2015 à 06:28
        Merci à toi et bonne journée Renal
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