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Le sapin de Noël
C’était le soir de Noël à Château Lambert, vers la source de l’Ognon. C’est par ces nuits d’hiver, quand le vent du sud, accompagné de neige, souffle en rafales dans les arbres qui couvrent les pentes du Ballon de Servance que Tribillery, le nain qui court dans les hautes branches des forêts, s’amuse à casser les cimes des sapins sur son passage. On entend ces craquements sourds dans l’obscurité, et c’est l’heure où le paysan d*e la montagne se terre dans son logis, à l’abri du froid, de la faim et des mystères de la nuit.
C’est pourtant par ce mauvais temps que deux filles du hameau, chaussées de bottes en paille de seigle et couvertes d’une longue « guenonche »*, descendirent à Servance pour assister à la messe de minuit.
Lorsqu’elles furent sur le chemin du retour, le vent s’était calmé. La lune apparaissait dans le ciel, entre les nuages qui glissaient vers les sommets des Vosges. La montagne qu’on appelle la Planche des Belles Filles resplendissait de beauté sous cette lumière argentée. La neige était lourde sous les pieds, et le silence imposant rendait la vallée encore plus belle, lorsque les deux paysannes rencontrèrent trois jeunes femmes vêtues de longues tuniques blanches. C’étaient des fées, les trois Demoiselles qui habitent sur le sommet de la Planche des Belles Filles, qui leur doit son nom. Comme toujours elles avaient un sourire bienveillant, et proposèrent aux deux voyageuses de leur offrir ce qu’elles demanderaient.
- Nous n’avons besoin de rien, dirent les jeunes filles, nous ne pensons qu’à rentrer chez nous, pour nous réchauffer devant le feu de la cheminée, et nous endormir ensuite.
- Hé bien, dirent les fées, prenez cette cime de sapin, c’est notre cadeau ; prenez-en soin, bonsoir et bonne nuit !
Arrivées chez elles, les deux paysannes déposèrent la cime de sapin à côté de la cheminée, réanimèrent le feu, burent une tisane de fleurs de tilleul et de bourrache, et s’en allèrent dormir.
A leur réveil, elles furent bien surprises de voir que le sapin avait grandi et se tenait bien droit, tandis que ses branches étaient couvertes de pommes rouges et de beignets de cerises.
Le jour de Noël de l’année suivante, elles mirent ainsi un jeune sapin à côté de la cheminée, et le prodige se renouvela. C’est depuis ce temps-là qu’est née la coutume de l’arbre de Noël, coutume qui passa de l’autre côté du Ballon, dans les vallées du Rahin, de la Savoureuse et de Masevaux, pour se répandre dans toute l’Alsace.
Emile Raguin
Extrait de « La Vouivre et la Lauzine »
*Guenonche : pèlerine faite d’une quantité de longes écorces d’osier prélevées au printemps, lors du blanchiment de chaque brin.
Tags : sapin, noel, filles
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Commentaires
Quel beau conte ! cela serait bien si tous les sapins de Noël (sans parler de religion) pouvaient apporter bonheur, réconfort et nourriture à tous ceux qui en ont besoin....
Très bonne journée et gros bisous.
bonjour brigitte,
C'est encore bien belle histoire que nous contes la brigitte, ma maman adorait les sapins et je me souviens ces moments merveilleux quand je le décorais,merci tout plein brigitte et un gros bisou monette
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Joli conte de noël.
Bon mercredi Brigitte.
Christian