Voici un recueil de poèmes, de textes qui m'ont touchée profondément. J'ai déjà mis, il y a quelques jours un extrait de ce puissant recueil sur le blog (http://pestoune.kazeo.com/khorshak-laurent-gaude-a205109426). Mais il fallait que je vous parle de l'ensemble de l'oeuvre. Tout parle d'humanité, de désespoir, de révolte, d'injustice, de culpabilité, d'impuissance.
Ces mots m'ont fait mal parce qu'ils touchent au plus profond de la cruauté, des larmes. Les mots pleurent, dénoncent le sort subi par les migrants, les esclaves (d'hier et d'aujourd'hui), les déracinés, les expatriés, les apatrides, les vieux, les mal aimés, les miséreux, les pleins d'espoir désespérés, les victimes... Souvent les mêmes personnes dans l'ensemble de ses situations. Des mots de larmes, de colère, des mots poignards, des mots appel, des mots conscience...
Kurdes, Vietnamiens, Afghans, Iraniens, Erythréens, hommes d'ici et d'ailleurs... noir, jaunes, marrons, blancs... tous différents, tous semblables, tous à la recherche de la même dignité qu'on leur a volé.
Les entendrons-nous ? Ouvrirons-nous enfin nos yeux et nos coeurs à la dimension de l'Humanité ?
"...Les maîtres, impassibles, les laissent un temps se fatiguer,
Puis, le fouet claque
Et la marche reprend.
Jusqu'où peut-on effacer un homme ?
Jusqu'où peut-on effacer un peuples ?
Jusqu'à l'ose.
Il ne restera rien..." (extrait du poème : Le chant des sept tours)
"...En plus de la crasse sur nos pieds,
De nos traits tirés de nuits par dormies,
En plus de nos corps secs,
Osseux et courbés,
Il y a le temps que l'on nous a volé,
En plus de chaque matin de grimaces,
Où l'on s'étire déjà fatigué,
Il y a le temps que nous n'avons jamais eu.
Il ne reste que nos dents cariées
Et nos démarches endolories.
Je ne connais que cela, fille:
Les vies lassées de travailler charbon,
Les vies suées à courir le quartier,
Les vies d'attente sans manger à satiété,
Les vies à prier Dieu et tous les saints,
Bras écartés,
Tête dolente..." (Extrait de Et pourquoi pas la joie ?)
"...Nous étions des milliers,
Avec nos valises ventrues,
Nos affaires empilées,
Nos corps encombrés de tout,
Soulagés d'être passés
Hors de portée, pour la première fois depuis des mois,
De la voracité du malheur.
...
Que sommes-nous devenus ?
Nous étions hommes forts,
Paysans aux mains de pierre.
Nous étions père de famille au sourire large
Prodiguant des conseils
Et veillant sur la tête de nos enfants.
Nous étions hommes travail,
Courageux à la peine.
Nous étions combattants parfois,
Pour que notre peuple ne soit pas qu'un nom que
l'on se transmet de père en fils, dans le secret
des veillées,
Mais une terre aussi.
Nous étions groupe de fête,
Danse entre frères et amis.
Que sommes-nous devenus ? ..." (extrait de Seul le vent)
"... Cela fait bien longtemps que nous avons tout pleuré.
Nos mères n'ont plus de larmes à donner.
Tant de vies échappées au couteau,
Tant de vies meurtries des mille manières inventées pour nous persécuter.
Les cris, nous ne les pousserons pas.
Parce que cela fait longtemps que nous l'avons fait.
Cris dans nos montagnes lorsque le monde nous chassait,
Cris dans nos villages vidés d'un nuage de gaz lâchés par les tyrans,
Cris poussés lorsqu'on nous a appris que des puissants dessinaient
sur des cartes des lignes qui nous sépareraient.
Kurdes nous sommes,
Mais sur quatre terres,
Ecartelés.
Kurdes,
Tirés par chaque membre,
D'aucun pays jamais... (Extrait de Si jamais un jour tu nais)