• Laurent HELLIER – De Rouen à l’enfer de Dunkerque

     

    Laurent HELLIER – De Rouen à l’enfer de Dunkerque

     

     

    Un livre plein d’émotions, non seulement pour la page d’Histoire qu’il ouvre mais pour les mots tirés d’un carnet retrouvé venant du grand-père de l’auteur. Ce carnet noir dont tout le monde avait connaissance mais qui a été perdu, est presque devenu une légende familiale, lorsqu’il a enfin été retrouvé au hasard d’un rangement de cave. C’est un pont entre le passé et le présent, entre l’historien et le témoin. Quoi de plus fort que de lire un témoignage vécu de cette sombre période. Ce grand-père, Francis Lelièvre, amoureux des mots, nous partage la guerre de l’intérieur avec ses mots mais aussi avec ses dessins.

    Le 2 septembre 1939, mobilisation générale, tous les hommes rejoignent leurs régiments. Francis Lelièvre, lui, rejoint la 253e Compagnie Hippomobile du 3ème Escadron du Train des Equipages Militaires de Rouen avec le grade de Maréchal des Logis. Une semaine d’incertitude où l’Etat-major ne semble pas bien savoir grand-chose, un fourre-tout. Les hommes sont en butte au doute, aux questions, à l’excitation pour certains. Tout cela est encore bien joyeux. Puis enfin les choses se précisent ; le 8 septembre, la compagnie hippomobile embarque dans le train en partance pour une destination inconnue. Après un pénible voyage, particulièrement pour les chevaux, suivront une interminable marche dans la chaleur, puis la pluie avec des organismes non préparés et la souffrance qui en résulte. Une marche qui les amène au Pas-de-Calais, puis dans le Nord. Ce n’est pas pour rien qu’on a appelé cette partie, la drôle de guerre qui s’est prolongée jusqu’aux premiers bombardements du 10 mai suivant. En effet, il y a une véritable inaction de la part des autorités, les hommes attendent, un peu désœuvrés avec pour occupation des corvées et parfois des déplacements donnant l’impression plus d’une errance qu’une avancée vers un poste de commandement. Mais laissons Francis Lelièvre nous raconter la suite.

    C’est lors d’une permission qu’il passait en famille à Rouen que le jeune auteur apprend l’envahissement, par l’Allemagne, de la Belgique et du Luxembourg sans trouver une véritable résistance. Il est sommé de rejoindre sa compagnie au plus vite.

    De nombreux mois ont passé depuis son départ de septembre, longs, tristes sans vraiment rien de précis, comme un flottement mais cette fois ça y est, l’enfer a commencé. Les hommes sont-ils prêts à affronter l’horreur qu’ils rencontreront ?

    Le premier bombardement essuyé laissera un souvenir terrible dans la mémoire de ces hommes. Tergnier sera ravagé sous les bombes. Une centaine de morts seront à déplorer. Mais ce ne sont que les premiers d’une longue liste.

    Les hommes avancent de jour comme de nuit d’étapes en étapes, subissant les bombardements des avions ennemis, croisant les pauvres gens fuyant l’ennemi. Les pauvres chevaux paieront un lourd tribut, épuisés, apeurés, vulnérables ils seront les victimes des bombardements. Quant aux autres, ils sont exténués, affamés parfois, les pieds insuffisamment pansés au grand dam de ces hommes pour qui les chevaux sont importants.

    Ils se trouvent pris dans ce que l’Histoire a appelé « la grande débâcle » et que notre auteur a surnommé « la fuite éperdue ». En effet après l’exode de la population, ils croisent des soldats de toutes nationalités qui fuient devant l’offensive allemande tels des fantômes ayant vécu le pire. Et la suprématie du ciel reste encore et toujours allemande.

    Pour Francis Lelièvre et sa compagnie, cette guerre se résume à une longue errance sous des bombardements, poursuivis par les blindés ennemis avec l’épuisement d’une marche sans fin, dans des conditions de survie que personne ne peux imaginer, qui les mène de la France à la Belgique puis les ramènera en France jusqu’à Bray-Dune, Malo-les-Bains puis  Dunkerque où règne l’enfer.

    La compagnie hippomobile n’est pas une unité de combat mais de soutien et de logistique sans défenses, même pas motorisée ou si peu mais avec chevaux et charrettes diverses. A ce titre elle aurait dû se trouver loin des combats et pourtant elle va s’y trouver au plus près. Ces hommes  vont côtoyer la déroute de l’armée française et des compagnies anglaise. Et pour ces hommes, l’ordre d’abandonner les chevaux est totalement incompréhensible et une douleur sans nom.

    Des ruines à perte de vue, des bombardements et des tirs sans arrêt, la faim, la soif, la peur, l’horreur à chaque coin de rue avec la perspective soudaine que la mort peut être le  bout du chemin, c’est dans cet esprit que les hommes n’ont plus qu’un espoir : fuir par la mer et gagner l’Angleterre. Il faut attendre et attendre encore. Les quelques navires qui s’approchent des côtes sont impitoyablement bombardés et coulés. Les hommes se terrent dans le sable pour éviter d’être fauchés par une rafale d’arme lourde ou par un obus.

    Enfin, la possibilité d’embarquer leur est offerte. La majeure partie de la compagnie monte à bord du Maréchal Foch. Mais la place manquant, Francis Lelièvre et deux de ses amis se trouvent à bord du Guido Brusti. Une chance, ils seront quasiment les uniques survivants de leur unité. Enfin l’Angleterre est là et le camps de repos où ils pourront se reposer avant de retrouver les côtes françaises avec l’inquiétude de ce qu’ils retrouveront à leur retour.

     

    C’est vraiment un récit poignant, nous faisant entrer en plein cœur de la tourmente. Pour tous ceux qui portent un tant soit peu d’intérêt pour cette période de l’Histoire, ce témoignage est incontournable. Le livre est en lui-même un beau livre, illustré de photos familiales et issues de collections privées, vous aurez plaisir à le lire.

     

    Vous pourrez le trouver aux Editions COMEVER-DE RAMEAU ;

    http://www.comever.com/index.html

    Et pour les normands dans ces librairies :

    http://derameau.com/siteDUNKERQUE1940/libraire.html

     

     

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  • Commentaires

    1
    Césarion
    Mardi 2 Août 2016 à 06:41
    bel hommage et beau résumé ...une histoire poignante en effet ... à lire avec la sensibilité du soldat de l'époque.
      • Mardi 2 Août 2016 à 09:25

        Nous avons toujours les versions des États-majors, des politiques, des historiens, des soldats des années après, mais cette fois nous pouvons lire le ressenti d'un soldat au coeur de l'Histoire. Avec lui on vit l'excitation, les questionnements, la peur, le désespoir. C'est plus humain que les pages officielles.

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